Brexit : A Bruxelles, «tout le monde s’en fout»
Par Jean Quatremer, correspondant à Bruxelles — 18 octobre 2018 à 20:16
Encore un échec ? Ah bon ! Les interminables et répétitives négociations du Brexit n’intéressent plus personne à Bruxelles, hormis, bien sûr, la presse britannique dont c’est devenu l’unique obsession. «Tout le monde s’en fout», confirme Alain Lamassoure, président (ex-LR) de la commission d’enquête du Parlement européen sur l’évasion fiscale. De fait, l’échec du sommet de mercredi soir, présenté comme «crucial», a surtout provoqué un soupir de lassitude face à ce qui est vu comme un énième rebondissement d’un psychodrame uniquement britannico-britannique.
Car, en réalité, il n’y a plus de négociations entre l’Union et le Royaume-Uni depuis presque un an et demi, mais «une lutte interne extrêmement violente au sein du parti conservateur dont on ne voit pas encore l’issue», selon le Belge Guy Verhofstadt, patron du groupe libéral et négociateur du Parlement européen pour le Brexit. Simplement, l’hypothèse d’un «no deal» devenant de plus en plus probable, l’Union et les Etats membres préparent, résignés, l’arsenal législatif nécessaire pour y faire face.
«Suicide national». Certes, le référendum du 23 juin 2016 a causé un vrai choc dans les institutions communautaires, car l’Union, d’abord création franco-allemande, a depuis la fin du siècle dernier été largement façonnée par le Royaume-Uni au point que sa langue et son idéologie libre-échangiste sont devenues l’alpha et l’oméga de la pensée européenne. Le Brexit a donc été vécu sur le mode de la trahison : comment un peuple si pragmatique, qui a réussi à prendre en grande partie le contrôle d’une construction communautaire qu’il abhorrait, a-t-il pu commettre un tel «suicide national» selon l’expression d’Alain Lamassoure ?
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