Vent de critiques sur le projet de taxation du numérique – Electron Libre

Par Isabelle Szczepanski

Extraits d’un article paru sur ElectronLibre le 20 mars 2018

Avant même sa publication, le projet de Pierre Moscovici pour taxer le numérique fait déjà l’objet de nombre de critiques, et ce même de la part de ceux qui se battent depuis des années pour une juste taxation du numérique. L’OCDE a d’ores et déjà émis des réserves sur le procédé utilisé. De nombreuses entreprises européennes grincent déjà des dents, estimant que la proposition est loin de concerner les seuls GAFAs et pourrait les entraver dans leur développement ! Au Parlement européen, Alain Lamassoure craint que l’adoption d’une telle mesure – qui reste hypothétique – prenne des mois et retarde les discussions sur le sujet plus fondamental de l’assiette de l’impôt sur les sociétés, en cours d’examen.

La proposition de taxation du numérique par la voie d’une taxe – temporaire – sur le chiffre d’affaires sera présentée demain. On en connait déjà les grands traits qui ont fait l’objet de nombreuses fuites dans la presse. Fruit, à la base, d’une idée d’Emmanuel Macron, c’est le commissaire Pierre Moscovici qui a repris le dossier au niveau européen, afin de préciser ses modalités, et de convaincre les autres Etats membres que c’est la voie à suivre. Il aurait déjà convaincu une dizaine d’Etats membres. Mais le projet dont l’encre n’est pas encore sèche est en train de soulever un vent de contrariété.

Evidemment, les Gafas ne sont pas très heureux du projet, et nous y reviendrons. Mais auparavant, il faut souligner qu’en plus des entreprises européennes du numérique, certains politiques, qui se battent pourtant pour une juste taxation du numérique depuis des années, ne sont a priori pas favorables au projet qui sera présenté demain. Ainsi, Alain Lamassoure, député européen qui a pris en charge le sujet de la taxation du numérique dans cette institution depuis plusieurs années, estime que son processus d’adoption mènera à un énorme gaspillage d’énergie, qui serait mieux dépensée ailleurs. “Je suis en désaccord avec l’approche française“, nous a t-il confié. “Je ne dirais pas qu’il s’agit d’une fausse piste, mais je pense que l’éléphant va accoucher d’une souris. Je m’explique : il est évident que les 500 millions d’Européens sont d’accord pour faire payer impôts aux sociétés du numérique. Le président Macron le souhaite également. La Commission suit, et a examiné le dossier. L’Allemagne suivra sans doute. Mais le temps que tous les protagonistes se mettent d’accord, cela prendra des mois, et cela pour aboutir à quelque chose qui rapportera peu.” Il poursuit : “d’après les évaluations faites, la taxe qui sera proposée rapportera moins de 5 milliards d’euros par an. Et pendant ce temps là, ils laisseront le projet ACCIS de côté. »

Le projet ACCIS est celui concernant l’assiette consolidée de l’impôt sur les sociétés (appelé aussi CCTB, son acronyme en anglais), dans lequel le parlement européen – sous la houlette d’Alain Lamassoure et du néerlandais Paul Tang – a proposé au Conseil d’étendre la définition de l’établissement permanent utilisée dans de nombreux traité bilatéraux. Une telle extension permettrait de répartir les chiffres d’affaires des sociétés du numérique à travers l’Europe, là où ils sont gagnés, et calmerait le jeu de l’optimisation fiscale. Alain Lamassoure estime que “ce projet est le bon véhicule pour taxer le numérique.

L’intégralité de l’article est à retrouver sur ElectronLibre