Le Traité simplifié et la relance de l’Europe


Après deux ans de paralysie et de doute, voilà l’Union européenne relancée. L’accord intervenu lors du Conseil européen des 21 et 22 juin est une double bonne nouvelle.


Sur le fond, d’abord. C’est peu dire que l’essentiel des novations que comportait le projet de Constitution est préservé : la quasi-totalité des changements institutionnels et juridiques du traité signé le 29 octobre 2004 se retrouvent dans les conclusions du 22 juin relatives au « traité modificatif ». Et, cette fois, le consensus pour recourir à la ratification parlementaire partout où cela est possible donne une solide garantie d’éviter un nouvel « accident de ratification. » Si bien que le nouveau traité devrait s’appliquer dès juin 2009, au moment des prochaines élections européennes : si ce calendrier est tenu, le temps perdu par l’échec des référendums français et hollandais aura quasiment été rattrapé.


Sur l’état d’esprit, ensuite. Il y avait longtemps que les grands dirigeants européens n’avaient pas pris à bras le corps l’avenir de l’Union comme ils l’ont fait au solstice de juin. Une chancelière allemande aussi habile que déterminée, un nouveau Président français mettant son infatigable dynamisme au service de la cause commune, et aussi les Premiers Ministres espagnol, italien, britannique, luxembourgeois, hollandais participant à ce travail d’équipe, tandis que le Tchèque aidait à convaincre le Polonais : derrière la dramaturgie médiatique, c’est une image réconfortante, et qui augure bien de la relance politique de l’Europe, au-delà de l’accord sur ses institutions.


Comme le traité constitutionnel, le traité rectifié vise à combler les trois lacunes qui affectent l’Union :


– Un système de décision efficace, en abandonnant l’exigence de l’unanimité dans la quasi-totalité des cas, au profit d’un accord à la majorité qualifiée entre les Etats membres. La concession faite aux Polonais ne porte pas sur ce point essentiel, mais sur la date d’entrée en vigueur du nouveau mode de calcul des droits de vote respectifs de chaque Etat : le système actuel, qui surreprésente les petits et moyens Etats, s’appliquera jusqu’en 2014.


– Des dirigeants propres à l’Union, qui se substitueront aux dirigeants nationaux, censés gouverner l’Europe pendant leurs heures supplémentaires. Il s’agit du Président à temps plein du Conseil européen, du Haut-Représentant pour les affaires étrangères et la sécurité, et du Président de la Commission européenne, désormais élu démocratiquement.


– Un fondement démocratique irréprochable. Ceux qui décident au niveau européen seront désormais clairement identifiés et élus pour cela, et pour cela seulement, par les citoyens eux-mêmes. Le Parlement européen exercera la plénitude du pouvoir législatif à égalité avec le Conseil des Ministres, et il aura le dernier mot en matière budgétaire. C’est lui qui élira désormais le Président de la Commission : autant dire que, si les partis politiques européens s’organisent à cet effet – en annonçant à l’avance le nom de leur candidat(e) pour la fonction -, celui-ci sera bel et bien élu par les représentants des 500 millions de citoyens européens, comme le Premier Ministre d’un régime parlementaire.


Ce n’est pas une réforme, c’est une révolution : les citoyens prendront enfin le pouvoir en Europe ! Si tout va bien, cela interviendra dès le printemps 2009, pour la prochaine élection européenne.


Alain Lamassoure, le 24 juin 2007