Interview au Parisien: «Macron ne sait pas à quelle famille européenne il va se rattacher»

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Alain Lamassoure, est vice-président de la délégation française du Parti populaire européen (PPE), classé à droite. Il réagit aux ambitions européennes affichées par le parti d’Emmanuel Macron, à la veille d’un sommet européen à Bruxelles.

Emmanuel Macron, qui retrouve ce vendredi ses pairs européens pour un sommet informel à Bruxelles, veut reproduire à l’échelon du continent le big-bang politique qui lui a réussi en France l’année dernière. Rien de moins que l’explosion des mastodontes du Parlement de Strasbourg. Le PPE (Parti populaire européen) qui regroupe les familles de la droite et son pendant à gauche, le PSE (Parti socialiste européen).

Alain Lamassoure,vice-président de la délégation française du Parti populaire européen (PPE), réagit aux ambitions du chef de l’Etat.

Le discours proeuropéen d’Emmanuel Macron a soulevé l’enthousiasme au Parlement européen. Et pourtant, il y rencontre des résistances. Comment l’expliquez-vous ?

Alain Lamassoure. Son élection a été ressentie comme une formidable bonne nouvelle dans toute l’Europe. Il arrive avec un préjugé très favorable, à un moment où l’Europe a besoin d’une relance. Il n’empêche que, sur le fond, il y peut y avoir des divergences.

Emmanuel Macron souhaite réitérer au Parlement européen la recomposition politique qu’il a menée en France, avec En Marche. Peut-il y arriver ?

Nous sommes 27 pays. Ce n’est pas le dirigeant de l’un des 27 qui va recomposer toute la politique européenne. Il a pu recomposer la politique française, parce qu’il est arrivé — avec un talent fou et un génie de la campagne — à un moment où les partis politiques français étaient tous en crise grave. Mais l’échiquier européen n’est pas l’échiquier national. Il n’y a pas, tout d’un coup, une famille européenne qui va naître pour dire : Macron est un Dieu, nous voulons soutenir sa politique. Son problème, c’est qu’à l’heure où nous parlons, il ne sait pas à quelle famille européenne il va se rattacher. Il va vraisemblablement vouloir en créer une nouvelle à partir de la famille centriste actuelle, qui l’accueillera sans doute volontiers. Mais pour être influent, pour avoir un maximum de députés, il va falloir qu’il trouve des partenaires importants dans les grands pays.

Qui peuvent-ils être ?

Le seul parti politique important, qui aura des effectifs sensibles et qui est totalement dans la ligne macronienne, c’est Ciudadanos en Espagne. Mais cela ne suffit pas.

N’y a-t-il pas tout de même une attente vis-à-vis de LREM, qui propose de former des majorités de projet ce qui est la spécificité du Parlement européen ?

Mercredi, lors du vote sur la fiscalité des entreprises, nous avons eu une alliance entre la droite, les socialistes, les centristes et les écolos. Cela, nous le faisons tous les jours. La recherche du compromis est inhérente à l’ADN du Parlement européen. S’ils viennent avec cet état d’esprit, nous les accueillerons à bras ouverts. Mais ce ne sont pas eux qui vont révolutionner le fonctionnement du système.

Pour les élections européennes, LREM souhaite rassembler « de Daniel Cohn-Bendit à Alain Juppé ». Quel regard portez-vous sur cette démarche ?

Elle me semble à la fois naturelle et très sympathique. Sur sa politique européenne, Emmanuel Macron est capable de réunir beaucoup de personnalités au-delà du parti qu’il a créé. Il attirera, tous ceux qui, à droite, se sont comme moi évaporés de LR et à gauche, tous les socialistes modérés qui sont proeuropéens et ne se reconnaissent plus dans le PS actuel.