Emmanuel Macron replace la France au centre de l’échiquier européen

La double victoire électorale du jeune président lui donne la légitimité nécessaire pour jouer un rôle central en Europe.
Un hymne à la joie entonné dans la tiédeur du printemps, des drapeaux européens agités avec enthousiasme par la foule. Un discours volontariste et une ligne réformatrice assumée : il n’en a pas fallu beaucoup plus pour qu’en quelques jours l’image de l’Europe passe de l’ombre à la lumière et que la France réapparaisse sur les radars de ses voisins.
« L’élection d’Emmanuel Macron a remis la France au centre du jeu européen. Et sa volonté de réformes, accueillie en Allemagne comme une divine surprise, a été confortée par un large succès qu’il a obtenu à l’occasion du premier tour des législatives », estime l’eurodéputé Alain Lamassoure. Cet « euro-optimisme » tout neuf qui semble avoir déjà réussi à stopper la contagion du populisme dans plusieurs pays du bloc européen n’est pas né seulement de l’habileté politique d’Emmanuel Macron. « Le nouveau président français a bénéficié d’une conjonction de phénomènes géopolitiques inédits », précise Yves Bertoncini, directeur de l’InstitutJacques Delors.
Des vents favorables
Le désengagement annoncé des Etats-Unis vis-à-vis de l’Europe, la criante antipathie affichée par le nouveau président américain à l’encontre de la chancelière allemande, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne sont autant de vents favorables qui ont permis à Emmanuel Macron de prendre la main diplomatique.

Au sommet de l’Otan fin mai, puis en invitant le président russe à Versailles, « il a joué une partition empreinte de realpolitik, replaçant la France au cœur du dispositif européen », ajoute Yves Bertoncini. « Merkel a tenté de s’afficher comme le leader du monde libre mais le numéro de portable, c’est à Macron que Donald Trump l’a demandé ! »
Rupture
Sur la scène européenne, Emmanuel Macron n’a pas eu beaucoup de mal à marquer une rupture avec son prédécesseur. « La France avait perdu son leadership au sein de l’Union européenne », rappelle Thierry Chopin, directeur des études de la Fondation Schuman. Durant son quinquennat, François Hollande n’a pas su donner corps à son ambition européenne
« Sur la crise migratoire, il a regardé ostensiblement ailleurs », accuse Alain Lamassoure. Une trop grande passivité que le député européen met sur le compte d’un péché originel : l’incapacité du dirigeant socialiste à tenir les engagements budgétaires européens de la France. « En gagnant face à Marine Le Pen sur un projet proeuropéen, Emmanuel Macron peut se prévaloir d’une légitimité sans précédent en matière européenne depuis le référendum sur le traité de Maastricht », estime Thierry Chopin.
Activisme militaire
Ce moment, les voisins de la France l’attendaient depuis longtemps. Combien de fois Angela Merkel à qui certains – en France mais aussi à l’est de l’Europe – reprochaient de tenir l’Europe sous son joug « austéritaire » – n’a-t-elle pas réclamé une France plus forte avec laquelle elle pourrait coanimer l’espace politique européen ?
Ces dernières années, la faiblesse économique française était compensée par un fort activisme dans le domaine militaire. « Ce qui pourrait rééquilibrer le tandem serait un rattrapage économique français allié à une plus grande implication de l’Allemagne sur le terrain militaire et diplomatique », estime Yves Bertoncini.
Sauveur de l’Europe
Ce renouveau politique européen, également appelé de leurs vœux par l’Italie et l’Espagne, n’est cependant pas assuré, note Alain Lamassoure : « La France sera écoutée et aura une capacité d’entraînement proportionnelle à la manière dont elle saura régler ses problèmes. » On ne passe pas du statut de mauvais élève à celui de sauveur de l’Europe en quelques discours.