“CADRE FINANCIER PLURIANNUEL : LE COUP D’ENVOI DE LA NÉGOCIATION DU CFP MET LA PRESSION SUR L’ECOFIN”, article publié dans “Europolitique”, le 8 mai 2013
La négociation formelle du cadre financier pluriannuel 2014-2020 (CFP) entre le Parlement européen et le Conseil démarrera le 13 mai, étant entendu que les ministres des Finances donneront leur aval, le lendemain, à une rallonge en deux étapes de l’actuel budget de l’UE. Obtenir un accord politique à l’EcoFin «
ne sera pas facile
», prévient une source bien placée.
Les négociations sur le budget à long terme de l’Union entre le Parlement européen et le Conseil sont en rade depuis l’accord du Conseil européen du 8 février. Le Parlement a exigé, avant d’entamer les négociations formelles, la garantie politique que les 11,2 milliards d’euros qui manquent au budget 2013 de l’UE seront versés. C’est la Commission qui a déterminé ce montant dans le deuxième projet de budget rectificatif (PBR 2) (1) .
Pour sortir de ces trois mois d’impasse, le Premier ministre irlandais Enda Kenny s’est rendu à Bruxelles le 6 mai pour rencontrer les présidents Martin Schulz (PE) et José Manuel Barroso (Commission). La présidence irlandaise a expliqué qu’elle allait essayer d’obtenir de l’EcoFin du 14 mai que le budget actuel de l’UE soit augmenté de 7,3 milliards d’euros en paiements, comme une première étape. Cette hausse serait liée à une garantie politique de compléter les dépenses de l’UE plus tard dans l’année, dans le cadre d’une seconde tranche si nécessaire.
Cette perspective a aiguisé l’appétit du Parlement, qui a accepté d’organiser le premier trilogue avec la présidence irlandaise, représentant le Conseil, et la Commission, le 13 mai. Les députés attendent de l’EcoFin un accord le lendemain, faute de quoi ils annuleront la suite des négociations.
Le Parlement européen exige «
une garantie absolue
» que le budget de l’UE sera augmenté des 11,2 milliards d’euros en 2013, a déclaré le négociateur en chef Alain Lamassoure (PPE, France), le 7 mai, alors qu’il présidait la commission des budgets (BUDG). Cela signifie une déclaration politique claire confirmant la disposition du Conseil à compléter les dépenses de l’UE à l’automne. «
Si ce qui sort de l’EcoFin reste totalement confus sur la deuxième tranche, les négociations seront interrompues
», a-t-il prévenu. Lors d’un vote informel, BUDG a appuyé cette approche.
Vu les contraintes budgétaires des Etats membres, la présidence irlandaise a encore du pain sur la planche d’ici l’EcoFin : aucune majorité qualifiée n’a pu être trouvée pour soutenir la démarche en deux étapes avec une tranche de 7,3 milliards d’euros pour commencer, au cours de la réunion du 7 mai du Comité des représentants permanents (Coreper). L’État membre clé que la présidence doit rallier est l’Allemagne. L’Espagne et la France sont également dans une certaine mesure réticentes. «
Le Conseil ouvre les vannes de manière contrôlée
», indique une source.
À l’EcoFin, de facto, on peut décompter le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark et la Finlande qui ne voteront pas en faveur de la démarche. L’Autriche est également réticente. Mais ce groupe ne peut pas bloquer la rallonge par un vote à la majorité qualifiée. Madrid, qui aurait à débourser de l’argent de son budget central, mais en répercutant ce prélèvement sur ses budgets régionaux, estimera que la rallonge du budget 2013 de l’UE est une pilule difficile à avaler. Mais l’Espagne devrait accepter un compromis. La France aurait préféré une somme inférieure, mais on sait qu’elle est prête à accepter les 7,3 milliards lorsqu’on en sera au niveau ministériel. L’Allemagne ne veut pas céder au PE tant que le Conseil n’aura pas l’assurance que les députés acceptent définitivement les 7,3 milliards.
Plusieurs sources croient en un accord des ministres à l’EcoFin du 14 mai. Il ne peut toutefois être exclu que le Conseil mette la barre plus haut. «
Le temps presse pour trouver un accord
», dit un diplomate prudemment optimiste qui souligne que le CFP est beaucoup plus important que le budget 2013 de l’UE, qui devra de toute façon être complété plus tard dans l’année. «
Ces décisions se prennent toujours à la dernière minute
», ajoute le diplomate.
Par Gaspard Sebag
(1) Le montant correspond à un arriéré d’impayés et à un manque de fonds dont 9 milliards d’euros relèvent de la cohésion