Résumé de la conférence de presse du 10 mai 2010 sur « le financement de l’agenda 2020 malgré la crise budgétaire »



Conférence de presse d’Alain Lamassoure – 10 mai 2010



Résumé du document de propositions adressé aux hautes autorités européennes



« FINANCER L’AGENDA 2020 MALGRE LA CRISE BUDGETAIRE »


1.

Le paysage économique de l’Union européenne rappelle un lendemain de guerre.

Sans s’attarder sur le cas des pays que les marchés rassemblent sous l’acronyme désobligeant de PIGS, rappelons que la production industrielle de la zone euro est retombée à son niveau d’il y a dix ans. Par rapport à la richesse produite, la dette publique française est deux fois supérieure à la dette africaine. L’Allemagne ne parvient pas à transformer sa remarquable compétitivité en augmentation de sa richesse nationale : sur dix ans, avant la crise, son taux de croissance moyen annuel est resté inférieur à 1%. La livre sterling a perdu un quart de sa valeur, et le déficit britannique dépasse celui de la Grèce.


2.

La crise n’est pas la cause majeure de cette débâcle, elle en est le révélateur.

De nombreux Etats membres étaient frappés depuis longtemps par des maladies insidieuses, qui les ont dramatiquement fragilisés : maladie de langueur d’une sous-croissance chronique dans les trois plus grands Etats continentaux, modèles de croissance déséquilibrés ailleurs. A tous ces maux anciens vont maintenant s’ajouter les deux boulets supplémentaires que constituent, d’une part, la nouvelle dette due à la crise et à son traitement et, d’autre part, la montée vertigineuse des coûts entraînés par le vieillissement de la population européenne.


3.

La tentation protectionniste n’a pas encore été surmontée au niveau européen.

Au sein de l’Union, le protectionnisme, c’est-à-dire le chacun pour soi, à l’abri des autres, n’est plus commercial, ni monétaire, ni financier, mais il est politique :

c’est la fuite devant les solutions et les institutions communautaires.

Chacun est tenté de se protéger dans l’espace européen, voire contre lui. De mettre au point sa stratégie de désendettement et le nouveau modèle économique dont il a besoin sans tenir compte de son environnement européen. La montée des partis extrémistes dans les élections nationales récentes, mais aussi, hélas, l’expression de préjugés nationaux d’un autre âge dans des polémiques publiques entre certains grands médias et même certains dirigeants politiques montrent la gravité du danger.


4. Au contraire, la sortie de la crise par le haut passe par l’Europe. Mais pour cela, les initiatives déjà lancées doivent être complétées par quelques autres, plus novatrices.


Toute la stratégie « Europe 2020 » doit être orientée autour d’un objectif précis :

doubler le potentiel de croissance de l’Union, pour nous arracher à la malédiction du

1,5% subi depuis dix ans, et dont les économistes s’accordent à dire que, toutes choses égales d’ailleurs, il se maintiendrait pour dix ans encore. Faute d’une croissance suffisante, aucun de nos problèmes n’est soluble : chômage, endettement, adaptation de nos modèles sociaux.


La coordination des politiques économiques ne peut pas se cantonner aux seuls membres de l’Eurogroupe ou de l’Ecofin. Il faut mettre dans le jeu les parlements nationaux et, à travers eux, les opinions publiques, dans le cadre d’un véritable débat européen. Un débat annuel entre parlements nationaux, avec la participation du parlement européen, sur les orientations budgétaires des uns et des autres pourrait avoir une grande valeur pédagogique.


5.

Le moment est venu de sortir de l’impasse budgétaire dans laquelle se trouve l’Union européenne.

La ruine des finances publiques nationales ne nous permet plus de différer l’ouverture du nécessaire débat de fond que les Etats membres contributeurs nets repoussent depuis dix ans. Contrairement à ce qui est dit ici ou là, les gouvernements restent prêts à décider des dépenses européennes : on l’a vu lors du dernier Conseil européen à propos de l’aide aux pays en développement dans la lutte contre les changements climatiques. Mais ils refusent que ces dépenses transitent par le budget communautaire. Or, le budget, c’est la mesure précise du degré de confiance des gouvernements dans l’Union européenne et du degré de solidarité qu’ils sont prêts à accepter. Force est de reconnaître que cette confiance et cette solidarité sont aujourd’hui plafonnées.


6.

Le problème du budget européen passe par le choix de nouvelles ressources propres.

Le Parlement européen a suffisamment débroussaillé le sujet pour qu’on sache comment y parvenir sans remettre en cause en quoi que ce soit la souveraineté fiscale des Etats, ni aggraver la charge fiscale globale pour les contribuables.


7. Au-delà du budget communautaire, dont l’ordre de grandeur ne pourra évoluer significativement dans les années proches,

le financement des politiques européennes et des objectifs communs passe aussi très largement par les budgets nationaux

. Il faut en prendre pleinement conscience, et commencer à débattre du partage des financements entre les fonds dans l’esprit du principe de subsidiarité, qui ne s’est guère appliqué en matière budgétaire.


8.

L’approche européenne est également la seule qui peut aider à régler significativement le problème des finances publiques nationales.

Soit en générant des économies par le transfert de charges vers Bruxelles, là où la centralisation de la gestion permet d’éviter les doubles emplois. Soit en incitant à un partage des tâches bien plus systématique qu’aujourd’hui entre les Etats membres eux-mêmes : l’aide au développement, la recherche, les divers aspects de la politique d’immigration, et, plus encore, la défense sont des domaines où les finances publiques nationales peuvent puiser dans « les dividendes de l’Europe ».


9.

Il est temps de donner à l’Europe le volet financier qui manque à ses institutions.

Ce sera une négociation complexe, longue, politiquement très difficile puisque sa conclusion requerra l’unanimité. Mais l’Union connaît la formule qui lui permet de gérer sa propre complexité : c’est celle que la dernière présidence belge avait mise en œuvre, il y a dix ans, sous le nom de « convention ». La prochaine présidence belge pourrait réunir une

Conférence financière européenne

constituée selon les mêmes bases. Mandat lui serait donné de réunir dans une

Charte financière

les principes dont l’Union a besoin pour financer ses politiques, notamment les rôles respectifs des budgets nationaux et du budget communautaire, la manière de financer celui-ci sans peser sur ceux-là, et le contrôle démocratique de toutes les politiques européennes, quelle que soit l’origine de leur financement.


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