Grande vitesse pour le Pays Basque
Le 8 décembre, les conseils d’administration du Conseil des élus et du Conseil de développement du Pays basque ont adopté par consensus leur avis commun sur le projet de ligne ferroviaire à grande vitesse sud-Europe atlantique: feu vert pour le lancement des études techniques, assorti de précautions rigoureuses sur l’insertion dans l’environnement et de précision sur les dessertes supplémentaires qui permettront de faire bénéficier l’ensemble du Pays basque de ce nouveau service.
Cette prise de position revêt une importance capitale. La procédure dite du “débat public” concernant ce projet s’achève le 31 décembre. Voilà douze ans que nous avons inscrit la liaison TGV Paris-Madrid par l’ouest sur la carte des grandes infrastructures terrestres finançables par l’Union européenne. Après bien des retards et des tergiversations, nous savons maintenant que Paris-Bordeaux sera achevée d’ici 2016, et la partie espagnole, avec l’Y basque, entre 2010 et 2013. Nous étions menacés de devenir le chaînon manquant de cette grande voie transeuropéenne.
Comme pour chaque grand projet, les oppositions et les inquiétudes n’ont pas manqué de s’exprimer: c’est précisément le rôle du “débat public” de permettre à chacun de poser des questions et de donner son opinion. Le Conseil des élus a été le premier à demander une expertise indépendante, pour compléter l’information donnée par RFF. Une fois les préconisations environnementales dûment prises en considération, les arguments en faveur du projet sont apparus déterminants.
Car le développement du trafic ferroviaire est au cœur de trois de nos objectifs majeurs pour le Pays basque: la maîtrise de l’insupportable trafic routier de marchandises, le développement de la relation transfrontalière, l’égalité des conditions de concurrence avec les autres métropoles françaises. Si la seule amélioration nécessaire de la voie actuelle permettrait sans doute d’atteindre l’un de ces objectifs, la réalisation des trois exigera clairement d’ajouter une ligne nouvelle.
A défaut, à quel objectif faudrait-il renoncer ?
Au transfert des marchandises de la route vers le rail ? Aucun défenseur de l’environnement et de la sécurité routière ne saurait accepter la monstrueuse congestion autoroutière et l’asphyxie polluante auxquelles aboutirait le maintien de l’accroissement du trafic de camion au rythme actuel. Les experts divergent sur le taux de transfert possible, mais il est clair qu’en l’absence de voie nouvelle, le transfert serait nul !
Au tram-train transfrontalier qui desservira toutes les villes côtières de notre Pays basque pour rejoindre le “topo” à Irun ? La vérité est que les transports collectifs ont pris beaucoup de retard sur le développement spontané des échanges économiques, touristiques, culturels, sportifs, festifs dans la conurbation Bayonne-Saint-Sébastien.
Au TGV voyageurs, qui a fait la fortune des villes françaises déjà desservies, et dont Toulouse nous dispute aujourd’hui la priorité temporelle ? Angers, Nantes, Rennes, Tours, Dijon, Besançon ont vu leur destin transformé par cet accès privilégié à Paris et Roissy. Lille a complètement changé sa vocation économique et son image, grâce à sa position sur un nœud ferroviaire qui la place à deux heures de Londres, une heure de Paris et une demi-heure de Bruxelles. En juin prochain, Strasbourg méritera mieux son ambition de capitale européenne en n’étant plus qu’à 2h30 de Paris. Tandis que Perpignan reconstruit tout le quartier de sa fameuse gare pour préparer l’achèvement de la liaison Paris-Madrid par l’est – quinze ans avant la nôtre…
Car une nouvelle ligne entre Bordeaux et la frontière ne pourra malheureusement pas voir le jour avant 2020 – ce qui nous laisse le temps pour en préciser le tracé et les caractéristiques techniques. C’est pourtant dès maintenant qu’il faut décider de la programmation et du financement des études: au niveau de l’Union européenne, la concurrence est féroce pour se partager les 8 Mrd d’euros prévus pour ce type de liaisons pour la période 2007-2013: le commissaire compétent, notre compatriote Jacques Barrot, nous a fait savoir qu’il ne pourrait prendre en compte que les projets soutenus par les Etats membres dès le début de la période.
Le Pays basque a pris ses responsabilités. A Paris et Bruxelles de prendre maintenant les leurs.
Alain Lamassoure, le 9 décembre 2006.