BILAN ET AVENIR DU PARLEMENT EUROPEEN

BILAN ET AVENIR DU PARLEMENT EUROPEEN

Il aura fallu trente ans pour que le Parlement européen mérite son nom. Elu pour la première fois au suffrage universel en 1979, il n’avait à l’époque qu’un pouvoir de décision limité à une partie du seul domaine budgétaire. Traité après traité, au prix d’une lutte constante contre les gouvernements et d’une alliance sans faille avec la Commission, il a acquis le pouvoir de légiférer dans quasiment tous les domaines de compétence de l’Union (co-décision), et c’est lui qui élit désormais le président de la Commission, c’est-à-dire de l’exécutif communautaire. Ce faisant, le Parlement a été un moteur permanent et puissant de l’intégration européenne et de la réduction du trop fameux « déficit démocratique » de l’Europe.

         Ce résultat a-t-il comblé ses vœux ou épuisé sa combativité ? Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, en 2009, le Parlement a mis un point d’honneur à être une machine législative irréprochable : à la surprise générale, 80% des textes législatifs sont adoptés après une seule lecture, et les délais de procédure excessifs liés à une division interne à la coalition majoritaire se comptent sur les doigts de la main.

Et pourtant, le combat pour aboutir à un vrai régime parlementaire n’est pas achevé. Mentionnons trois points.

1 – La procédure budgétaire reste un scandaleux déni de démocratie. Voté par le Parlement, le budget annuel est contraint par un cadre pluriannuel décidé par le seul Conseil européen. Quant aux recettes, non seulement le Parlement n’a aucun pouvoir, mais elles ne donnent lieu à aucun débat public, même au Conseil. Le budget est le talon d’Achille méconnu de toute l’action de l’Union.

2 – A défaut d’avoir adopté un mode de scrutin uniforme, les Etats membres ont la latitude de choisir leur système national pour élire leurs députés européens. Certains, dont la France, ont adopté un mode de représentation proportionnelle tel que leurs eurodéputés sont moins les élus du peuple que des fonctionnaires nommés par les chefs des partis. Dans ces pays, c’est la crédibilité de l’institution qui est en cause.

3 – Enfin, la légitimité du Parlement restera contestable tant qu’il ne sera pas composé sur le principe « un citoyen, une voix ». Héritage des premières improvisations institutionnelles de la Communauté européenne, lorsque l’assemblée parlementaire n’était qu’un forum de débats, la sur-représentation des « petits » pays commence à nuire à tout le processus de décision européen dans les Etats plus peuplés. Les considérants adoptés par le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe à propos du traité de Lisbonne doivent être pris au sérieux pour les développements futurs de l’Union.

 

                                                                                          Alain Lamassoure